Une fusée, comment ça marche ?
Dans le domaine spatial, le rôle d'une fusée est de transporter une charge utile (satellite, sonde, capsule habitée) au-delà de l'atmosphère et de lui donner une vitesse suffisante pour la mettre soit en orbite autour de la Terre, soit l'envoyer dans les confins de l'espace.
Le principe sur lequel est basé le fonctionnement des fusées est celui de l'action et de la réaction. Bien que la propulsion par réaction fut connu et mis en pratique depuis l'Antiquité, elle n'a été interprétée sur le plan théorique qu'à la fin du XVIIe siècle par Newton, lorsqu'il énonça le principe de l'action et de la réaction qui repose sur une loi naturelle, dite de la conservation de la quantité de mouvement. Ce principe signifie qu'à toute action correspond une réaction égale et de sens opposé. La fusée a été employée sporadiquement pendant près de 1500 ans, mais jusqu'au XXe siècle elle est restée un engin de guerre peu usité ou un objet de divertissement.
L'application du principe de la propulsion par réaction aux voyages dans l'espace n'est proposé qu'à la fin du XIXe siècle par le Russe Tsiolkovski et les premiers moteurs-fusées expérimentaux ne furent construits qu'au début du XXe siècle. Ce n'est seulement que grâce à d'importants efforts, stimulés notamment par les deux guerres mondiales, que l'astronautique est passée du rêve à la réalité. Les pionniers de l'étude des fusées contemporaines furent Tsiolkovski (1857-1935) en Russie, Godard (1882-1945) aux Etats-Unis, Esnault-Pelterie (1881-1957) en France, Oberth et von Braun (1912-1977) en Allemagne.
Le moteur-fusée constitue un système autonome: il emporte les substances (appelées ergols) nécessaires à son alimentation. Ne prenant appui sur aucun support, il est capable de fonctionner dans l'atmosphère comme dans le vide. Son déplacement repose sur l'éjection, en sens opposé, de gaz. Ainsi la fusée éjecte des gaz vers l'arrière et se propulse par réaction. La poussée, la force créée par un moteur-fusée, résulte de l'éjection d'une certaine masse de gaz à vitesse élevée. Sa valeur est donnée par la relation : Poussée (N) = débit de masse éjectée (kg/s) x vitesse d'éjection (m/s).
Dans un moteur-fusée, le carburant est brûlé dans la chambre de combustion qui est équipée dans sa partie inférieure d'une tuyère (canal d'éjection des gaz). La combustion produit de fortes quantités de gaz en expansion. Les gaz chauds exercent une poussée contre les parois de la chambre de combustion. Les forces exercées sur les parois latérales s'équilibrent mutuellement, ainsi la force résultante est nulle. En revanche la pression exercée par les gaz sur la paroi supérieure de la chambre de combustion produit une force qui n'a pas de contre-partie puisque la tuyère (canal ouvert) n'oppose pas de paroi à une poussée contraire. La résultante des forces exercées sur la chambre de combustion est donc dirigée vers le haut ce qui propulse la fusée. C'est le même principe qui intervient lorsque l'on gonfle un ballon. Si on le maintien fermé rien ne se passe, il y a équilibre des forces de pression sur les parois internes du ballon. Par contre si on lâche le ballon, l'air sort brutalement et créé une poussée qui propulse le ballon dans le sens opposé à l'ouverture.
Les substances utilisées pour alimenter un moteur fusée et lui fournir son énergie propulsive se nomment ergols. C'est généralement en faisant réagir 2 ergols l'un sur l'autre que sont obtenus la réaction chimique exothermique (qui dégage de la chaleur) et l'éjection de gaz recherchée. Un tel couple porte le nom de propergol. On distingue 2 catégories d'ergol: les combustibles, qui sont des substances réductrices, comme l'hydrogène, le kérosène, l'hydrazine, le diméthylhydrazine dissymétrique (UDMH), l'aluminium, etc.; et les comburants, qui sont des substances oxydantes (qui brûle le combustible), comme l'oxygène, le peroxyde d'azote, l'acide nitrique, le perchlorate d'ammonium, etc. Une autre classification considère l'état physique de l'ergol: solide, liquide ou gazeux.
Les ergols liquides sont stockables quand ils se conservent à température ambiante (hydrazine, peroxyde d'azote). Ils sont dits cryotechnique (technique du froid) si la conservation se fait à -200°C, c'est la cas du couple oxygène, hydrogène. Les ergols solides ressemblent à une pâte caoutchouteuse, où combustible et comburant sont bien mélangés.
On distingue deux grandes catégories de fusées : les fusées à propergol solide et les fusées à propergols liquides. Dans les deux cas, on appelle moteur la chambre à combustion. Dans des fusées à propergols liquides, les deux ergols sont stockés dans des réservoirs séparés, et alimentent le moteur-fusée selon un schéma bien défini. Dans des fusées à propergol solide, le combustible est stocké et brûlé dans le moteur même.
Aujourd'hui, dans le domaine du spatial, le terme fusée est souvent remplacé par lanceur.
Un lanceur possède plusieurs étages pour une raison simple. Par analogie, si l'on prend un camion qui veut effectuer, de manière autonome, le trajet entre Genève et Pékin. Deux possibilités s'offrent à lui. Il peut traîner une énorme citerne dans le lequel il emmènerait toute l'essence nécessaire au voyage. En fin de trajet, il aurait une énorme citerne presque vide à traîner ce qui est un handicap. Il peut aussi partir avec 3 petites citernes. A chaque fin d'utilisation d'une citerne, il s'en sépare afin d'avoir moins de poids à tirer. Avec les lanceurs actuels ce même principe est utilisé. Au départ le lanceur doit être propulsé par une poussée gigantesque étant donné son poids très important. Au fur et à mesure qu'il brûle son carburant, donc qu'il perd de la masse, il serait possible de réduire la poussée seulement si les masses devenus inutiles peuvent aussi être réduite. D'où l'idée d'un lanceur avec un premier étage équipé de moteurs lourds mais développant une grande poussée au départ. Lorsque celui-ci a atteint sa vitesse maximale, ayant épuisé tout son carburant, il cesse de fonctionner et se sépare du reste du lanceur. Le deuxième étage commencera alors de fonctionner, ayant déjà une vitesse importante. Pourvu d'un moteur plus léger il n'aura donc par à accélérer les équipements lourds du premier étage. A ce concept de lanceur à étages on ajoute parfois des propulseurs auxiliaires disposés à coté du premier étage et qui sont largués après combustion.
Le lanceur européen Ariane 4 est aujourd'hui un lanceur très compétitif et des plus fiable. Il est composé de 3 étages et doté de propulseurs d'appoint à poudre et à liquides. Toutes les versions d'Ariane 4 ont en commun un premier étage emportant 226 tonnes d'ergols et propulsé par 4 puissants moteurs (Viking), un deuxième étage propulsé par 1 moteur un peu moins puissant (Viking IV), un troisième étage avec un moteur cryogenic, une case à équipement (intelligence du lanceur) sur laquelle s'adapte une coiffe ainsi qu'un dispositif pour lancer plusieurs satellites à la fois. Les différentes versions d'Ariane 4 se distinguent par le nombre et le type de propulseur d'appoint utilisés et elles permettent de mettre en orbite des satellites de 2 à 5 tonnes. Ariane 5 (725 tonnes), le nouveau lanceur européen, est composé d'un étage principal cryotechnique (moteur Vulcain qui délivre une poussée de 116 tonnes), pourvu de 2 propulseurs à poudre, qui délivrent une poussée combinée de 1370 tonnes au décollage, et d'un étage supérieur à propergol stockable destiné à propulser la charge utile d'Ariane 5 vers orbite finale. La poussée de ce moteur est de 3 tonnes.
Adresses internet utiles : http://www.esa.int ,http://www.arianespace.com
Livres: Etapes et techniques de l'astronautique, Jean-Pierre Oehmichen, Bordas (les compacts); Dictionnaire de l'Espace, Larousse; ou encore Le grand atlas universalis de l'espace.
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