En effet ces questions sont bien légitimes car elles font intervenir
des notions très inhabituelles à notre quotidien.
1) Pourquoi il a fallu 10 milliards d'années pour que la lumière arrive d'une galaxie qui était initialement très proche de nous ?
Pour comprendre ceci il faut aussi inclure la *vitesse* initiale des
objets. Si déjà à cette époque la vitesse
relative d'éloignement était proche
de celle de la lumière, on peut s'imaginer (même sans
inclure de relativité) que le temps mis pour parcourir la distance
entre deux objets
soit d'autant plus long que la vitesse d'éloignement est proche
de celle de la lumière. La lumière doit rattraper la
"cible", nous, qui
dû à l'expansion de l'univers, se meut à peine
moins vite qu'elle. Le chemin finalement parcouru est ainsi bien
plus long que la distance
géométrique initiale.
Pour une discussion plus approfondie du problème mais qui demande
des connaissances plus poussées que celles d'un citoyen normal,
il faudrait tenir
compte que la vitesse d'expansion de l'Univers, et donc de ses constituants,
peut varier selon le modèle d'univers. Mais l'idée
générale reste la même.
2) Pourquoi les galaxies lointaines apparaissent petites alors qu'initialement elles pouvaient être proches ?
La réponse à cette question est plus compliquée
car il faut bien distinguer entre ce qui est réellement observé
et ce qu'on inclut dans un modèle
simple de galaxie et d'univers.
Supposons d'abord que l'on considère une galaxie de taille fixe
avec un bord net. Là aussi les rayons lumineux issus des bords
de la galaxie vont devoir
rattraper l'observateur, et le temps nécessaire peut dépasser
10 milliards d'années. Ce qu'il faut comprendre est que ce
ne sont pas les rayons qui
*initialement* convergaient vers la cible qui l'atteindront, puisque
celle-ci se déplace. En fait les rayons qui atteignent ensemble
la cible seront
beaucoup moins convergents, c'est-à-dire que l'angle sera plus
petit.
Maintenant parlons de quelques complications.
- Pour certains modèles d'univers le diamètre angulaire
d'un objet de taille fixe peut croître à un redshift z>1.25
à cause des effets de courbure d'espace
(les rayons ne vont plus en ligne droite dans un espace courbe).
- Le "bord" observé d'une vraie galaxie n'est jamais net, mais
correspond à une valeur seuil de la brillance de surface.
Or cette brillance de
surface décroît très rapidement à grands
redshifts à cause de la dilution de la lumière dans un volume
d'univers croissant. Cet effet est important et
compense beaucoup l'effet géométrique.
- Le redshift, par définition, décale la lumière
émise vers le rouge. A grands redshift la majeure partie de la lumière
émise par une galaxie
se trouve décalée dans l'infrarouge. La galaxie
devient faible sinon continue de l'observer dans le visible.
- Les galaxies sont loin d'être des objets immuables. En
fait elles évoluent aussi bien en nombre, en taille qu'en brillance
(il faut bien
qu'elles se forment une fois !). D'après des mesures récentes
le maximum d'émission due aux étoiles (formées dans
les galaxies) aurait eut lieu autour
d'un redshift de z=2. Au-delà, les grosses galaxies comme
la nôtre sont de moins en moins nombreuses et brillantes.
3) Quant à la question "Qu'en est-il exactement de la concurrence
dilatation de l'espace - lumière venant vers nous ?", je pense qu'elle
est illustrée par les réponses précédentes.
Selon le modèle d'univers cette dilatation d'espace varie, d'après
la vitesse d'expansion, ainsi que la
façon dont les rayons se propagent et se diluent, d'après
la courbure de l'espace.
Plus on s'approche du Big-Bang initial, plus on se heurte à des
horizons variés, de sorte que tant que l'on n'a pas de moyens d'observations
meilleures, la discussion de ces instants initiaux reste celle d'un
modèle, d'une hypothèse.
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Cette réponse a été préparée par Daniel.Pfenniger@obs.unige.ch