Il est dit sur les différentes réponses qui sont données sur le site (R21, R87, R103), que la théorie du «trou de ver» est purement spéculative, et tient plus de la science fiction que de la science. Or il m'a été donné de parcourir certaines publications scientifiques, dont je n'ai malheureusement pas retenu le nom de l'auteur, qui considéraient l'existence des trous de ver comme relativement probable. Voici donc ma question : Quel type d'observation, ou de donnée recevable comme telle, permettrait d'apporter un crédit «physique» à l'existence de tels objets ?

Tant qu'on n'a pas d'indice direct ou indirect de l'existence d'un phénomène, cette existence doit être considérée comme spéculative. Les trous de ver ne font donc pas (encore?) partie du domaine scientifique, mais bien du domaine de la science spéculative (à ne pas confondre toutefois avec les pseudo-sciences, qui ne s'appuient sur aucun argument scientifique; les trous de ver sont une prédiction, sous réserve de certaines hypothèses, d'une théorie bien établie). Lorsque des scientifiques donnent une probabilité d'existence des trous de ver (qu'elle soit très faible ou très grande), ils ne font qu'exprimer leur préjugé. C'est une attitude non-scientifique. Il est bien sûr tout à fait normal et justifié d'avoir une conviction personnelle non-scientifique, et même de la faire connaître (même pour un scientifique!); cependant, il est important qu'à ce moment là le scientifique annonce clairement que c'est son opinion qu'il donne. Il y a malheureusement souvent des dérives «scientistes», où des scientifiques oublient la rigueur de la démarche scientifique, et annoncent que dans 1000 ans au plus tard l'être humain voyagera à travers tout l'Univers au moyen de trous de ver...

En ce qui concerne les indices de leur existence, il faut savoir que de nombreux scientifiques pensent que les trous noirs n'existent pas, bien qu'il existe de nombreux indices indirects. Ceci montre la difficulté de prouver quoi que ce soit dans ce domaine. En ignorant les trous de ver proches, qui fourniraient de nombreux indices observationnels, la situation des trous de ver est encore plus problématique. Vu de très loin, ils devraient a priori être encore plus discrets que les trous noirs. Une des possibilités serait d'observer d'importantes quantités de matière tombant dans un trou de ver (c'est une des «preuves» de l'existence des trous noirs), mais personne ne semblent avoir étudié en détail ce que l'on devrait voir. Et, d'après mon intuition, il est fort probable que le résultat soit identique à celui d'un trou noir -- et donc indistinguable. Il me semble donc qu'il faudrait soit en trouver un proche, soit en fabriquer un nous-mêmes. Inutile de préciser les incommensurables difficultés techniques liée à cette fabrication, que je considère comme au-delà des capacités de l'être humain!

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Cette réponse a été préparée par Stephane.Paltani@obs.unige.ch