La détermination du temps

Par très belles nuits lorsqu’on regarde vers le ciel, la première impression est de se trouver sous une voute étoilée. Un observateur patient pourra voir se lever une étoile à l’Est, elle décrira un arc qui s’élèvera à une hauteur maximum au-dessus de l’horizon lorsqu’elle passe par l’axe nord-sud. Puis dans une parfaite symétrie l’arc se prolongera à l’Ouest et l’étoile disparaitra sous l’horizon. Ce que l’observateur constate est dû au fait que la Terre tourne sur son axe. Partout sur Terre on peut faire les mêmes observations. Exception faite près des pôles où de moins en moins d’étoiles disparaissent sous l’horizon.

Les astronomes de l’antiquité avaient fait une description de la disposition des étoiles dans le ciel. Chaque civilisation y a vu des figures propres à ses croyances, les constellations. Au cours des siècles ces figures ont toujours la même forme et gardent la même disposition. Les étoiles paraissent être fixes entre elles et disposées sur une sphère. Cette sphère apparente est appelée sphère des fixes. Elle va servir d’étalon pour la détermination du temps.

Pour pouvoir repérer une étoile les astronomes ont crée le système de coordonnées équatoriales (fig. 1.-). La Terre accomplissant un tour sur son axe en 24 heures ils ont divisé le plan équatorial en 24 secteurs de 15 degrés chacun. Les secteurs sont comptés en heures et croissent dans le sens directe d’Ouest en Est. C’est l’Ascension droite. Son origine est le point vernal.Il est défini par le moment ou le Soleil passe sur l’Équateur dans le sens hémisphère sud, hémisphère nord (printemps). Perpendiculairement au plan équatorial ils ont divisé un secteur en 90 degrés partant de l’Équateur et allant jusqu’aux pôles. C’est la Déclinaison, elle est comptée positivement pour l’hémisphère nord et négativement au sud.

Coordonnées équatoriales :
Dans le système de coordonnées équatoriales la position d’une étoile est définie par son ascension droite et sa déclinaison, exemple:

Aldébaran (α Tauri)
Ascension Droite (j2000)  = 04h 35m 55,20s
Déclinaison (j2000) = +16° 30′ 33,49″

 

La grande régularité de la rotation de la Terre, et la connaissance précise de la position des étoiles sur la sphère des fixes vont permettre de déterminer le temps. La Terre tourne au centre de la sphère des fixes. Si on prolonge par l’esprit le plan méridien à l’infini, (grand cercle passant par les pôles et le zénith) il va balayer toute la sphère des fixes. A chaque fois que le plan méridien va se trouver en face d’une étoile, nous connaitrons grâce à l’ascension droite de l’étoile le temps sidéral du lieu. A partir de cette observation il est facile de déterminer le temps moyen local et de régler les horloges. La détermination du temps est une observation astronomique de l’instant exact ou une étoile culmine dans le plan méridien.

Les observations méridiennes

Elles s’appellent ainsi parce qu’elles se font dans le plan méridien. Les astronomes ont utilisé des lunettes, spécialement construites pour ce type d’observations, les lunettes méridiennes. Leur vocation étant d’observer les passages des étoiles dans le plan méridien, elles étaient incapables de viser à l’Ouest ou à l’Est. La précision de la mise en place de la lunette avait une incidence directe sur la détermination du temps. La lunette reposait sur deux socles placés de part et d’autre du plan méridien, et rigoureusement aligné dans l’axe Est-Ouest.

 

Un dispositif permettait de retourner l’instrument dans cet axe de manière à compenser ses dissymétries. Le tourillon A venait se loger à l’emplacement du B. Il était fréquemment procédé à cette opération. Trois défauts d’alignement (fig. 2.-) pouvaient se présenter.

  • 1.- Lorsque l’axe de la lunette n’est pas parfaitement horizontal, les points A et B forment un angle nommé : Inclinaison.
  • 2.- Un mauvais alignement dans le plan Est-Ouest s’appelle l’Azimut.
  • 3.- Un défaut de perpendicularité de la lunette par rapport à l’axe Est-Ouest peut apparaitre. Il s’appelle la Collimation. Il peut être corrigé en utilisant des points de repère placés sur une très grande base.

 

 

A l’Observatoire de Genève on utilisait une mire placée au Salève pour régler le point sud. Un second repère se trouvait aux fruitières de Nyon pour s’aligner au nord. En 1940 les mires extérieures on été abandonnées et remplacées par une mire posée sur un pilier proche de l’Observatoire ( 10-20m.). Une optique fabriquait une image de la mire à l’infini.

Pour pouvoir observer le passage d’une étoile au méridien il faut pointer la lunette à la déclinaison de l’étoile que l’on veut observer. L’observateur voit alors l’étoile pénétrer dans le champs de vision de la lunette et le traverser horizontalement. Un réticule vertical matérialise le méridien. A l’instant où l’image se trouve derrière le réticule, il faut noter l’heure de l’horloge de référence. L’écart de temps, entre l’ascension droite de l’étoile et le temps lu sur l’horloge dénoncera l’écart de marche de celle-ci. Dans la pratique (fig 3.- en haut à droite) le réticule était muni de plusieurs fils parallèles. Cela permettait de faire plusieurs estimations, et de moyenner les observations.

Les premières observations se sont faites avec la technique dite de « l’œil et de l’oreille ». L’horloge battait les secondes, on amplifiait au besoin le bruit de l’horloge. Juste avant le passage de l’étoile au méridien l’observateur regardait l’horloge (fig. 1.-) qui était proche de la lunette et il notait le temps. Ensuite il regardait à l’oculaire en écoutant les battements de l’horloge. Les fils du réticule disposes régulièrement permettaient de juger de la position de l’étoile et de déterminer le temps. Par cette méthode la précision de la détermination du temps se faisait avec une erreur probable de 0.05 à 0.07 seconde. La procédure avait l’inconvénient d’être très dépendante de la qualité de l’opérateur. On parlait d’équation personnelle pour les petites erreurs systématiques introduites par l’observateur. Des techniques ont été misent au point pour rendre les observations impersonnelles. Les appareils développés: Des chronographes enregistrant simultanément les signaux de l’horloge et les signaux du micromètre suivant l’etoile durant son passage dans le champ de la lunette méridienne.

En 1936 on compara la marche des horloges les plus précises disponibles à cette époque avec le temps linéaire déterminé par les méthodes astronomiques. Les observations montrèrent des petites variations de quelques millièmes de seconde.

janvier février mars avril mai juin juillet aout septembre octobre novembre decembre
-.24 -.70 -.99 -.48 -.02 +1.3 +1.5 +1.1 +0.2 -.16 -.40 +1.3

Malgré ces variations, et en tenant compte, la détermination du temps par des méthodes astronomiques a eu cours à Genève jusque dans les années 50. ( Ref : Edmond Guyot : Histoire de la détermination du temps (p.222)